Les chercheurs du monde entier s’attaquent au problème du manque d’eau douce, de plus en plus prégnant en raison du réchauffement climatique, et l’innovation est au rendez-vous.
Alors que plus de 2 milliards d’individus dans le monde n’ont toujours pas accès à l’eau potable, selon l’ONU (Organisation des Nations unies), les pénuries d’eau représentent un enjeu majeur pour la recherche. De nombreux projets voient ainsi régulièrement le jour pour lutter contre le phénomène ; certains plus extravagants que les autres…
Remorquer des icebergs depuis les pôles
Certains sont plutôt fous et semblent peu réalistes. À l’image du remorquage d’iceberg. L’idée n’est pas nouvelle, mais elle a refait surface en 2019, en Afrique du Sud. C’est le spécialiste du sauvetage de navires Nicholas Sloane, connu pour avoir mené l’opération de sauvetage du Costa Concordia, qui a remis le sujet sur le tapis. Et ce, un an après la menace de coupure d’eau dans la ville du Cap, évitée de justesse en imposant un rationnement aux 4 millions d’habitants de la ville sud-africaine.
Le projet de Sloane, baptisé Southern Ice Project, consisterait à capturer un iceberg de 125 millions de tonnes dans le pôle Sud et à le remorquer avec des navires jusqu’aux côtes d’Afrique du Sud. Il faudrait ensuite l’ancrer au large du pays. La fonte du bloc de glace permettrait de fournir suffisamment d’eau douce pour couvrir 20 % des besoins de la ville pendant un an, selon Sloane. Et si l’opération semble improbable, elle a pourtant bien été mise en route. En 2019, Nicholas Sloane affirmait avoir constitué une équipe de glaciologues, d’océanographes et d’ingénieurs. Il affichait même le soutien de deux banques, ainsi que d’une entreprise suisse spécialisée dans les infrastructures liées à l’eau, qui seraient prêtes à participer au financement du projet, qui demanderait plus de 167 millions d’euros. Restait à obtenir l’accord du gouvernement sud-africain pour acheter l’eau de l’Antarctique. Affaire à suivre…
Provoquer la pluie en envoyant des fusées dans les nuages
Autre élément ciblé pour récupérer de l’eau douce : les nuages. Plus précisément l’ensemencement des nuages pour provoquer des précipitations, une technique utilisée pour la première fois en 1956 au Canada. À l’époque, l’objectif était tout autre puisqu’il s’agissait de supprimer la grêle pour protéger les récoltes.
Plus récemment, le Centre national de météorologie et de sismologie, aux Émirats arabes unis, pays particulièrement touché par la sécheresse, s’est attaqué à cette méthode. Mise en route en 2015, son système repose sur des avions qui envoient, dans les nuages, des fusées. Celles-ci libèrent alors des cristaux de sel pour accroître la condensation.
Le dessalement, au cœur de nombreux projets de recherche
Moins spectaculaire, mais plus viable : le dessalement retient particulièrement l’attention de nombreux instituts de recherche. C’est le cas de l’Institut européen des membranes (sous tutelle de l’École nationale supérieure de chimie de Montpellier, de l’université de Montpellier et du CNRS) qui a travaillé sur une amélioration des performances de la désalinisation de l’eau de mer par osmose inverse. Cette méthode de purification par filtrage utilise des membranes semi-perméables qui ne laissent passer que les molécules d’eau et retiennent le sel et autres impuretés.
Pourquoi l’équipe de recherche souhaite faire évoluer cette technique ? Car, jusqu’alors, l’osmose inverse ne s’appliquait pas à une exploitation à échelle industrielle, du fait d’une inadaptation des membranes aux conditions réelles de pression et de salinité.
L’Institut européen des membranes a donc réussi à mettre au point une membrane plus puissante, décrite comme biomimétique, c’est-à-dire qui reproduit des propriétés du monde vivant. Le procédé s’inspire ainsi directement d’une protéine nommée aquaporine, présente dans les membranes cellulaires de certains animaux et végétaux. La nouvelle membrane est hybride : sa structure en forme d’éponge combine l’utilisation de polyamide (matière plastique) et de canaux artificiels d’eau. Une solution qui s’avère bien plus efficace que les membranes utilisées jusqu’à présent, et ce même dans des conditions industrielles, en plus de réduire la quantité d’énergie nécessaire au dessalement, selon les chercheurs.
© Dustin K Log – Unsplash