Par Sylvain Delzon, Université de Bordeaux
Qu’as-tu fait quand, en rentrant de vacances, tu as trouvé ta plante d’intérieur avec les feuilles flétries ? Tu l’as arrosée ! Et pas n’importe où : au niveau de la terre. Et là, miracle, après quelques heures, les feuilles étaient à nouveau fermes et gorgées d’eau. Alors comment cette eau qui se retrouve au niveau des racines permet-elle à la plante de se maintenir en bonne santé, et ce jusqu’au bout de ses feuilles ?
Les plantes utilisent beaucoup d’eau, jusqu’à plusieurs dizaines voire centaines de litres par jour chez un grand arbre comme le chêne par exemple.
D’abord, l’eau est essentielle pour que la plante puisse capter du gaz carbonique (CO2) pour le transformer en oxygène que nous respirons : ce que l’on appelle la photosynthèse. D’autre part, cette eau transporte des éléments minéraux dissous (azote, phosphore, potassium, absorbés au niveau du sol) essentiels pour le bon fonctionnement de la feuille.
Cependant, cette eau ne représente qu’une part quasi négligeable de toute celle absorbée par la plante. Plus de 98 % de l’eau s’évapore au niveau des feuilles pour refroidir la température de la plante : on parle de transpiration. Le principal rôle de la transpiration est de réguler la température pour éviter que la plante ne grille (comme la sueur permet de réguler la chaleur du corps chez l’homme). Ainsi, la quasi-totalité de l’eau puisée dans le sol ne fait que traverser le végétal avant de s’évaporer dans l’atmosphère.
On comprend alors pourquoi la plante a énormément besoin d’eau mais une question demeure : comment l’eau parvient-elle à monter jusqu’aux feuilles de la cime des arbres ?
C’est la chaleur du soleil qui permet de transformer l’eau liquide parvenant aux feuilles en vapeur d’eau. Ainsi, plus il y a une intensité lumineuse forte, plus la feuille transpire et a donc besoin d’eau en provenance du sol.
De manière très schématique, la plante peut être décrite comme un tuyau (qu’on appelle le xylème). C’est en fait, un ensemble de très petits tubes qui sont mis bout à bout et qui transportent la sève depuis les racines jusqu’aux feuilles. C’est assez facile pour un trèfle, mais pour un séquoia de plus de 100 mètres de haut, comment fait-elle ? L’eau est littéralement aspirée vers le haut comme l’aspiration de l’eau dans un verre avec une paille. Elle monte ainsi jusqu’aux feuilles de la cime des plus grands arbres. Pas besoin d’une pompe contrairement à la circulation sanguine chez l’homme (dans laquelle le cœur joue cette fonction).
Quand il y a trop d’évaporation (en cas de forte chaleur et de sécheresse importante), la plante doit éviter de trop se déshydrater et régule ainsi ses pertes d’eau au niveau des feuilles. La transpiration est régulée par les stomates : des petits trous qui se trouvent à la surface des feuilles. Ils peuvent s’ouvrir et se fermer en fonction des conditions climatiques. Quand la sécheresse de l’air et/ou du sol devient trop importante, la plante peut ainsi complètement stopper sa transpiration en fermant ses stomates, ce qui peut conduire à de la mortalité de feuilles si la chaleur perdure trop longtemps. C’est pour cela qu’en période de sécheresse, certains arbres ont des teintes automnales même au mois de juillet car ils se protègent en sacrifiant leurs feuilles.
Des bulles et tout se bouche
Une trop forte évaporation peut mettre la plante en danger de mort. La sève est tirée vers le haut par l’action de la transpiration au niveau des feuilles. Quand l’aspiration devient trop importante, la montée de la sève peut être perturbée et même empêchée par l’entrée de bulles d’air dans les vaisseaux, phénomène que l’on appelle l’embolie. L’air va remplacer la sève et envahir l’élément la conduisant. Ce dernier ne pourra plus transporter l’eau. L’embolie se produit lors d’épisodes de sécheresses intenses et/ou prolongées et peut conduire à la mort de la plante.
Bien sûr, le transport de l’eau n’est pas uniquement régulé au niveau des stomates. Toute la « tuyauterie » de la plante participe pour éviter à l’embolie de se propager. L’eau peut circuler de n’importe quelle racine vers n’importe quelle feuille. De même, les vaisseaux peuvent être plus ou moins étroits, ce qui permet également de limiter les conséquences d’une éventuelle embolie. Les différentes adaptations (stomates, vaisseaux) permettent d’ailleurs de comprendre la répartition des espèces à l’échelle du globe : les espèces des milieux secs sont plus résistantes à l’embolie que celles des espèces tempérées et tropicales. On comprend aussi pourquoi, l’été, certaines plantes doivent être plus arrosées que d’autres !
Cet article a été écrit avec l’aide d’Alix Boher-Sanchez, étudiante en M1 Médiation des sciences à l’Université de Bordeaux Montaigne et Bastien Castagneyrol, chercheur à l’INRAE.
Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : tcjunior@theconversation.fr. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre.
Sylvain Delzon, Directeur de Recherche en physiologie et écologie végétale, Université de Bordeaux
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.