La prise en charge des individus souffrant d’obésité doit, en plus de se concentrer sur les patients atteints du coronavirus, s’intéresser aux personnes souffrant de la solitude et du stress liés à la pandémie.
Bien que paradoxal, le lien entre maladie transmissible et maladie non transmissible est plus que jamais d’actualité. La pandémie que nous traversons en est l’illustration : l’affection au coronavirus SARS-CoV-2 montre un impact encore plus sévère chez les individus atteints de pathologies chroniques. Pour le cas de personnes obèses en particulier, le risque d’hospitalisation s’avère supérieur, de même que la gravité de la maladie et le taux de mortalité. Ce à quoi s’ajoutent les effets des mesures de confinement sur les comportements des individus face à leur santé et leur bien-être, dont le renoncement aux soins.
Pour l’Association européenne d’étude de l’obésité (EASO), il est primordial de porter attention à l’évolution de la santé des personnes souffrant d’obésité, pendant la pandémie de COVID-19, mais aussi dans la gestion d’après-crise. Et ce « pour éviter d’imposer un fardeau encore plus lourd aux individus, aux systèmes de santé et à la société à court, moyen et long terme ». L’EASO a donc publié, en mai dernier, dans Obesity Facts, un article mettant en avant sa position sur la réponse à la pandémie.
Accompagner les patients face à l’isolement
Dans un premier temps, il est important de réfléchir à l’impact de l’isolement sur l’état de santé physique et psychologique des individus, notamment ceux souffrant d’obésité. Car même si la France a entamé son déconfinement le 11 mai, les personnes les plus vulnérables, dont les malades chroniques, ont été invitées à rester chez elles, comme l’a précisé le président de la République dans son allocution du 13 avril.
Or, la pandémie en elle-même, ainsi que cet état de confinement, peuvent entraîner des comportements inadaptés, du fait de l’augmentation des facteurs de stress. En effet, selon l’EASO, « la quarantaine et l’isolement peuvent accroître la détresse psychosociale de nombreuses façons, influencées par la durée, la fourniture d’informations, la peur de l’infection, l’isolement social et familial, la disponibilité des fournitures, les difficultés financières et la stigmatisation ».
Plusieurs outils existent pour soutenir ces patients, comme le soutien thérapeutique à distance. Des experts de l’association travaillent d’ailleurs à l’élaboration de téléconsultation. Dans ce domaine, l’EASO rappelle que, à l’instar de l’ensemble des patients chroniques, les personnes souffrant d’obésité nécessitent un suivi médical régulier. La télémédecine doit également être exploitée afin de remplacer les consultations médicales habituelles.
Établir ou renforcer le lien, virtuellement, avec les proches semble également opportun. Il s’agit aussi d’encourager les activités et les divertissements à domicile (activité physique d’intérieur, livres, jeux, etc.).
Autre aspect qui peut accroître le stress : les informations. Ainsi, l’apport d’informations sérieuses peut jouer un rôle prépondérant, notamment avec l’intervention des sociétés scientifiques. L’association met alors en exergue les nombreux canaux de communication à sa disposition. Elle affirme ici sa capacité, au cœur de la pandémie, à identifier les besoins des professionnels de santé et des malades, à diffuser dans toute l’Europe des indications crédibles, ainsi que des recommandations auprès de la communauté scientifique, de la population et des politiques.
Une prise en charge spécifique des patients obèses atteints du COVID-19
Dans un deuxième temps, l’EASO explique que la prise en charge du COVID-19 en elle-même diffère pour les patients atteints d’obésité. Avant tout, l’alerte est lancée sur la stigmatisation et la discrimination dont peuvent souffrir ces patients. L’association met en exergue le risque que cela comporte, au-delà de l’impact psychologique : « Des expériences de soins de santé stigmatisantes peuvent amener les personnes obèses à éviter ou à retarder le contact avec les prestataires de soins pendant cette pandémie, ce qui peut entraîner des résultats plus graves pour le COVID-19 ».
Alors même que les individus obèses sont susceptibles de présenter des symptômes plus graves et d’avoir besoin de traitements plus complexes en soins intensifs. Une étude de cohorte, menée par une équipe du CHU de Lille (59) et publiée le 9 avril dans la revue Obesity, s’est intéressée aux complications liées à l’obésité dans l’affection au SARS‐CoV‐2. Les résultats montrent bien que la sévérité de la maladie augmente en même temps que l’IMC. Mais aussi que les patients souffrant d’obésité grave ont davantage besoin d’une ventilation invasive mécanique, et ce, indépendamment de l’âge, de l’hypertension ou du diabète.
D’autres travaux de recherche, conduits dans la ville de New York (États-Unis) auprès de plus de 4 000 patients, révèlent que l’obésité sévère est l’un des principaux facteurs de risque générant un syndrome de détresse respiratoire aigüe et la nécessité d’une intubation.
Restent deux caractéristiques non négligeables à prendre en compte pour ces patients. D’une part, le besoin en ressources médicales est supérieur, d’autre part, les malades souffrant également de malnutrition répondent globalement moins bien aux traitements.
Cliquez ici pour découvrir la position de l’EASO, en anglais.
© Todd Diemer – Unsplash